SANTOS TIC TANK

Il y a une montre que je chéris plus que les autres; un bijou précieux que je protège souvent en l’oubliant délibérément plus que de raison dans son écrin rouge. Je la garde comme un reliquaire là où j’entrepose toutes celles qui ont plus une valeur sentimentale que financière. Mais, bientôt, celle-ci va me quitter car il est temps de la transmettre à ma descendance. Et avant son départ, j’aurais voulu vous compter ces années que nous avons passées ensemble.

Elle est arrivée, dans ma vie, un matin de printemps et, la première fois que je l’ai vue, je me suis dit : » C’est elle » que je veux. Le premier jour l’arborant à mon poignet comme un nouveau symbole social, je la porte pour impressionner mon auditoire. Toutefois, cette dernière, cachée sous un de mes poignets mousquetaires s’était faite discrète et, pourtant, elle m’avait donné, ce jour là, une assurance jamais égalée.

Dans certains dîners, là où les Nabilla se pâment comme des poules en rûte, je pose délicatement ma main sur la table et, par un très léger mouvement du poignet, j’essaie, par jeu, de sentir le balancier interne qui égraine les secondes de ma vie. Mais, en vain, car cet objet de précision arbore un silence plus grand que si vous étiez au cœur d’un Parc Naturel de l’Ariégeois ; le silence est l’âme des choses.

Lorsque le temps s’emballe, au fur et à mesure de la journée qui passe, celle-ci bat la mesure et explore les minutes qui s’écoulent. Les engrenages s’entraînent et instaurent le rythme de ma vie comme si j’avais à mon poignet un microcosme solaire. Le tapage de la ville qui m’entoure ne vient pas perturber le temps silencieux qui s’égraine doucement et moelleusement dans ce boîtier étanche.

Ami de tous les temps, nous venons de passer trente ans ensemble et, aujourd’hui, je dois passer la main à ma filiation. Ton grand âge n’est pas un inconvénient pour venir séjourner sur le bras d’un jeune homme de trente ans. Donne lui autant de plaisir que j’en ai eu à ton contact. La transmission, c’est le luxe absolu, la trace du temps que je laisse et le rêve qui ne meurt jamais. C’est du luxe, c’est du rêve, c’est de l’émotion, c’est Cartier…

Anonymode