UNE FASHION WEEK SANS CON

Sartre avait raison : « l’enfer c’est les autres », et cela est quand même incroyable que nous réussissions à faire des oranges sans pulpe, des raisins sans pépin, des farines sans grumeaux, du café sans caféine, du sirop sans colorant et de la bière sans alcool sans jamais être capable de faire un monde sans imbécile ? Serions-nous capable de créer une Fashion Week sans nigaud ? Alors, nous nous sommes posés la question : que serait une semaine de la mode sans céphalo-abstinent ?

Nous commencerions, tout d’abord, par supprimer les agences de « pestes » qui font leur travail en dépit du bon sens et qui arrivent même à nous faire parvenir les invitations une journée après la présentation. Un monde sans selfie de « photos graveleuses », qui ne prennent pas les collections mais qui se prennent à la collection. Un monde sans photographes grossiers et mal élevés qui se battent pour une place et qui crient au premier rang en invectivant les invités : « décroisez les jambes Mesdames ».

Une Fashion Week aussi sans les garçons coiffeurs chauves et les couturiers manchots ou avec deux bras gauches, c’est selon. Exterminons les demi mondaines qui viennent pour trouver l’âme non pas sœur, mais l’âme riche qui les fera vivre quelques semaines de plus contre service de « chélation ». Une semaine entière sans « silly conne », ni gogo-tox pour que notre œil, qui finit par s’être s’habitué à l’infâme et l’horrible, ne finisse pas par confondre le laid du beau « tox ».

Un monde où les homosexuels ne discriminent pas les hétéros et inversement. Un monde où les sex-toys des uns et des autres ne se font pas passer pour des hommes ou des femmes d’affaires, mais seulement pour ce qu’ils sont : des objets sexuels efficients, et ce n’est déjà pas mal. Une semaine sans ces vieux présidents incontinents qui hantent les coursives à la recherche des ascenseurs pour regagner leur place. La fin du cocktail ampoulé, qui se veut moderne et branché mais qui est le plus ringard de Paris puisqu’il n’exprime pas l’exception culturelle française ; seule la vision de l’expansion culturelle à l’américaine. Une mode sans imbécile serait aussi des « people » qui viendraient en prenant les transports en commun pendant une semaine pour ne pas polluer plus que de raison cette ville saturée par les embouteillages.

Sans routeuse de mode prise dans le ruisseau, mais aussi sans ces femmes de chambre nouvellement clientes des maisons, sans ces ennemies du genre humain, ces bassets hargneux, bâtards du chien de Diogène. Une journée sans les inlassables chiffres du président Marrant qui vole au dessus d’un nid de gogos, une semaine exsangue de tous ces imbéciles, ces « cons et chaussée » qui forment la nouvelle route de la mode.

Une semaine de la mode reformatée pour l’occasion, pour notre plus grand plaisir, afin d’être juste présent pour regarder le spectacle des créateurs et non pas regarder le spectacle de la salle, mais l’harmonie n’est jamais donnée, elle doit indéfiniment se conquérir. A bon entendeur, salut.

Anonymode