LA PAÏVA VENUS CRAPULEUSE

Situé sur l’avenue des Champs-Élysées à Paris, ce splendide hôtel particulier fût construit entre 1856 et 1865 pour Thérèse Lachman, alias la marquise de Païva. Courtisane invétérée, la marquise assoiffée de luxe y prenait des bains de champagne et accueillait dans ses salons de nombreux hôtes de marque comme les frères Goncourt, Théophile Gaultier, Léon Gambetta, Ernest Renan ou encore Hippolyte Taine…

On les appelait les cocottes, les courtisanes, les poseuses, les gueuses, les pierreuses, les trotteuses, les grandes horizontales, les asphalteuses, les bitumeuses, les boulonneuses, les gommeuses, les soupeuses, les Venus crapuleuses, mais surtout les putains. Putain tire son origine du putois pour sa mauvaise odeur.

La plus célèbre d’entre elles, la Païva se fait construire un palais à l’endroit même où elle fut un jour raflée par la brigade des mœurs sur les Champs-Elysées. Son succès est dû à sa grande beauté mais aussi à son expertise de l’amour qui la propulse comme la bitumeuse la plus riche de Paris. Elle fit donc commencer les travaux de son hôtel particulier et, pendant la construction, les journaux suivaient l’état des travaux et s’interrogeaient sur leur bonne marche. Ainsi, le journaliste chroniqueur Aurélien Scholl, revenant des Champs-Élysées, on lui demanda s’il était passé devant l’hôtel en construction de Mme de Païva et où en étaient les travaux ? « Ça va, répondit Scholl, le principal est fait. On a posé le trottoir ! ».

Le chantier dura dix ans, et les Parisiens en voyant émerger les plafonds peints, les mosaïques, les marbres, la curiosité devenait de plus en plus palpable, et les rumeurs sur ce bâtiment couraient bon train. Celui-ci réceptionné en 1866, le Comte de Donnersmarck, lorsqu’il reçut la note à solder, s’écriera, sans qu’on puisse en vérité le taxer d’avarice mesquine : « Cela aura coûté bien cher ! »

Escalier en onyx jaune où tous les nouveaux membres du Club doivent se soumettre à une curieuse « initiation », la salle de bain d’inspiration mauresque et sa baignoire en argent, ou encore cet impressionnant plafond orné d’une admirable peinture de Paul Baudry, peintre de l’Opéra Garnier. La Grande Horizontale, en 1877, fut accusée d’espionnage, et la marquise fut obligée de fuir la France pour l’Allemagne où elle décédera le 21 janvier 1884, au château de Neudeck en Silésie. L’hôtel particulier, lui, existe toujours et est devenu un club privé qui veut oublier cette histoire.

Anonymode

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